Le monde est bousculé. Le monde est en mutation. Alors que tout nous paraît sombre, nous nous tournons vers les veilleuses d’espérance que sont les mères. Confinées ou pas, elles bâtissent les générations futures. Pour comprendre le sens de l’évolution de l’humanité dans ces temps troubles, nous nous sommes tournés vers des femmes dont la résilience face aux épreuves, offre un témoignage puissant, porteur d’espérance pour tou.t.e.s.
Cynthia fait partie de ces mères. Elles ont choisi d’incarner pour leurs enfants, les changements qu’elles souhaitent voir dans le monde.
Aux premiers mots échangés, nous sommes saisis par le contraste entre le ton apaisé et la part de son histoire qu’elle nous confie. Au fil de notre discussion, le voile se lève délicatement sur les fondations de cette force intérieure.
L’Amour donne des ailes
Cynthia se définit comme une nomade et nous emporte dans un voyage en enfance à Abidjan, sa ville natale. Elle y grandit entourée de l’amour des siens. « Cynthia va y arriver, elle va faire quelque chose de sa vie». Cette foi que ses parents ont placé en elle, va être son phare lorsqu’elle s’envole du nid familial, pour poursuivre ses études supérieures à Paris, en 2003. Confiance en elle, confiance en la vie, confiance aux autres. Erik en sera la preuve. Avec lui, elle découvre le grand Amour. Sans hésiter, elle donne une chance à leur histoire et part s’installer avec lui dans son pays, la Norvège. L’année 2007 marque un tournant dans sa vie : l’arrivée à Stavanger et son mariage. Laissant derrière elle ses quatre années d’études à l’École Française des Attachés de Presse(EFAP) et une carrière de mannequin en plein décollage.
« C’est l’amour qui m’a donné des ailes » nous confie-t-elle.
Ensemble, ils vont dépasser les différences culturelles, amenant leurs familles respectives à se découvrir et s’unir autour d’eux. « Lorsque ma mère est venue nous voir, le jour de son départ, Erik et elle pleuraient dans les bras de l’un et de l’autre. Elle, ne parlant pas l’anglais, et lui pas le français. Il s’est passé quelque chose entre eux, dépassant l’expression des mots. »
Une famille métisse à Stavanger
L’arrivée de leur première fille, Amayah, est le symbole de l’amour transcendant les différences. La petite fille est même à l’origine de la construction d’une relation renouvelée entre Cynthia et son propre père. Les deux familles s’unissent autour de ce jeune couple, audacieux, ambitieux, rien ne semble les arrêter pour s’aimer.
Cinq années plus tard, Ariella vient rejoindre la famille. Pour ses filles, Cynthia représente la Côte d’Ivoire. Elle leur transmet tout l’héritage qu’elle porte en elle. « L’authenticité a toujours été mon pilier. Il est important pour moi que mes filles sachent qu’elles ne sont pas seulement d’ici, mais qu’elles ont également une part d’elles, là-bas ». Les discussions, la gastronomie, la musique, sont des moyens par lesquels elle les ouvre à cela. Pour permettre à chacun de trouver sa place, des concessions sont faites. Elle renonce à parler le français avec les filles et se met au norvégien. Toutefois, pas de compromis sur les valeurs : respect et compassion en sont le socle.
« Ce sont les enfants qui deviennent des grandes personnes » affirme-t-elle avec conviction.
La vie de famille suit son cours, tenant l’Amour pour ancrage.
La famille à l’épreuve
L’Amour peut-il nous protéger de tout ? Cynthia va le découvrir à travers une grande épreuve. En décembre 2019, la séparation est actée. Elle survient après trois années au cours desquelles, elle a mobilisé toutes ses forces pour préserver l’unité familiale. « Je suis restée en mode combat, la famille c’est tout pour moi. » Mais Cynthia et Erik se sépare après 12 ans de vie commune.
En revenant sur cette période douloureuse de sa vie, ses mots ne laissent paraître aucune animosité. Aucune rancune ni regret envers celui pour qui elle avait tout quitté. Défiant l’avis de ses parents, osant le grand saut vers l’inconnu, avec pour seule promesse l’Amour. Puisque c’est ce qui l’avait menée jusque-là, elle décide de s’y accrocher pour dépasser sa souffrance. « Quand l’amour te coute, l’Amour te donne. » On devine aisément le sourire dans sa voix en prononçant cette phrase.
Cynthia a appris à imaginer un autre chemin au bonheur, revoir ses rêves, réorganiser sa vie, changer ses plans. Après avoir tout tenté pour éviter la rupture, elle rend les armes et accueille cette nouvelle séquence de sa vie. Commence alors pour elle, une série de décisions cruciales qu’elle va devoir prendre pour son avenir et celles de ses filles.
En février 2020, alors que le monde fait face à la crise du covid-19, le couple va vivre le confinement séparé, optant pour une garde partagée. Elle choisit de s’installer dans un appartement situé à cinq minutes de leur maison, permettant ainsi à ses enfants de garder le même environnement. « J’avais le choix de rentrer chez moi, près de ma famille. Retrouver ma tante Marie-Jo et ma mère, mes précieux soutiens. Mais je ne l’ai pas fait pour mes filles. Je suis venue ici, j’y ai construit ma propre famille. Même si c’est dur, j’assume ce choix. »
Pour chaque décision, elle se pose la question de savoir si elle agit pour le bien de ses filles, uniquement pour son bien ou contre son ex-mari. La réponse se rapprochant le plus de la voix de l’Amour, est l’assurance du meilleur choix pour tous les quatre.
L’histoire de Cynthia, confiée en toute authenticité, est riche d’enseignements. Chacun en tirera la part qui fait écho à la sienne. La résilience dont elle fait preuve est inspirante. Accepter de traverser les épreuves en incarnant réellement les valeurs qu’elle souhaite transmettre à ses filles. « Je veux leur donner un exemple de compassion, de constance, d’humilité et de foi ».
Cynthia, bâtisseuse du nouveau monde.
« Mon plus grand accomplissement serait que mes filles soient porteuses de certaines valeurs. Je sais quel chemin j’ai décidé de prendre pour cela.
Cynthia est une maman portée par une vision précise du monde qu’elle veut construire pour ses filles. Nous sommes persuadé.e.s que l’empathie, la compassion, l’amour, la confiance, la bienveillance vont transformer le monde et nous conduire vers des sociétés plus équitables. Vers un monde plus apaisé. Sortir du cercle vicieux de la souffrance qui engendre la violence. Cynthia est une femme libre, elle ne subit pas. Ses décisions sont pleinement éclairées, ancrées dans ses convictions. Ses filles se construisent en la regardant. Elle, leur mère, venue d’un autre continent, avec une culture et une histoire différentes, mais ne renonçant pas.
Elle nous rappelle, à nous parents, notre pouvoir de décider des hommes et des femmes qui feront le monde de demain. Nous participons aux tournants décisifs de l’histoire de l’humanité par l’éducation de nos enfants. Il est crucial de prendre conscience des changements qu’on espère voir. Car sur eux, reposera notre vision de l’éducation et la force de pouvoir en accepter les sacrifices. Devenir acteurs de ces transformations, c’est d’abord commencer par les incarner soi-même.
Il n’existe pas de modèle éducatif standard. Chaque histoire est unique. Celle de Cynthia en fait partie. En se confiant, elle nous offre un éclairage sur l’impact par l’éducation. Bien sûr, nous ne savons pas quels chemins choisiront nos enfants, mais il est de notre devoir de semer en eux les fondations solides.
Influenceuse sur les réseaux sociaux, elle fédère une communauté inspirée par son parcours et son approche de la vie. Elle est, sans aucun doute, un modèle de l’usage des réseaux sociaux, basé sur l’authenticité et le respect. En y préservant la part de leur histoire appartenant aussi à Eric, elle ne crée pas un espace où le jugement prendra le pas sur la compassion.
Aujourd’hui, elle nous permet de partager ce récit. Mais il appartiendra réellement à Amayah et Ariella de raconter l’histoire de Cynthia, leur mère.
C’est ainsi que s’écrivent les récits de celles et ceux qui transforment le monde.
*Vulnérâmes, Antonya David-Prince